2020 - Une année en musique

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L'année 2020 a été difficile, le monde de la musique n'a pas fait exception de ce point de vue là. Des artistes bouclé⋅e⋅s comme nous tou⋅te⋅s, sans pouvoir partager leur musique sur scène, et en pouvant difficilement vivre de leur musique (les tournées, avec le merchandising, étant une source de revenus importante pour de nombreuses formations).

Malgré tout, de nombreux très bons albums ont vu le jour cette année, quelques home sessions ou lives/bootlegs sont venus enrichir les sorties, et Bandcamp a permis aussi à un certain nombres d'artistes et de labels indépendant⋅e⋅s de respirer avec les Bandcamp fridays.

Bref, comme les années précédentes, voici une petite sélection d'albums et d'EPs qui m'ont accompagné cette année (avec quelques intrus sortis fin 2019).

L'album de l'année

  1. Emma Ruth Rundle & Thou, May our Chambers Be Full ; l'album de l'année avec cette collaboration entre Emma Ruth Rundle (et son folk ambiant) et Thou et leur sludge poisseux. Les ambiances éthérées d'ERR se marient parfaitement avec la lourdeur (et les cris de goule) de la bande de Baton Rouge.

Côté obscur

  1. Ingrina, Syste Lys ; quelques vieux morceaux dépoussiérés et quelques nouveautés pour cet album réjouissant de ce groupe français de post-métal instrumental, capable de construire des murs de son impressionnants.

  2. Sons of a Wanted Man, Kenoma ; du blackened post-hardcore/post-metal de Belgique, sorti sur l'excellent label Les Acteurs de l'Ombre, qui commence à proposer un catalogue black et apparenté aussi réjouissant que l'historique Debemur Morti.

  3. Asphodèle, Jours Pâles ; l'autre sortie de l'année des Acteurs de l'Ombre avec ce disque de metal atmosphérique à tendance black, avec les entremêlements du chant d'Audrey S. et des hurlements Spellbound. Je retire ce disque de ma liste, ayant appris depuis que la chanteuse a participé à des projets NSBM (et qu'on peut facilement la trouver en train de faire une quenelle).

Post-machins

  1. Respire, Black Line ; encore du blackened (post-)hardcore/screamo à tendance post-rock ; un peu comme si Godspeed You! Black Emperor (pour le post-rock classieux à cordes, la philosophie et l'importance du collectif), Deafheaven (pour le blackgaze) et Envy (pour le post-hardcore/screamo) s'étaient mis à jammer ensemble. Incontournable.

  2. Jambinai, Onda ; du post-rock coréen avec des instruements traditionnels qui donnent un petit feeling oriental (qui me rappelle certains albums des Canadien⋅nes d'Esmerine).

  3. Crippled Black Phoenix, Ellengæst ; dernier effort du groupe de Justin Greaves, avec un line-up plus resseré et des atmosphères plus sombres.

  4. Lord Buffalo, Tohu Wa Bohu ; la bonne surprise de l'année avec ce folk post-rockisant aux accents de Wovenhand (en moins grandiloquant ?).

Mélange des genres

  1. Zeal & Ardor, Wake of a Nation ; la claque de la fin d'année avec cet EP difficile à ne pas écouter en boucle. Autant le sous-texte du projet a toujours été très clair, autant les questions de discrimination raciale sont mises très frontalement en avant sur ce format court, qui tranche aussi avec une évolution vers des sons plus actuels (limite R'n'B par rapport au gospel des deux premiers albums) et des field recordings (de manif' Black Lives Matter). Et toujours avec ces blasts black metal. Un EP très direct et frontal, et avec untitre en pied de nez aux suprémacistes blanc⋅hes (difficile de ne pas le voir comme une référence au Birth of a Nation cher aux fanas du KKK).

  2. Ausgang, Gangrène ; le nouveau projet rap/rock de la rappeuse Casey et du guitariste Marc Sens (qui avaient déjà sévi ensemble au sein de Zone Libre). Très bon disque bien servi par les textes et le flow sans faille de Casey.

  3. Nova Twins, Who are the Girls? ; difficile d'ignorer l'existence du duo street-punk formé par Amy Love et la bassiste Georgia South, qui balancent des EPs bien sentis depuis quelques années (l'incontournable Bassline B*tch). Enfin un long format pour le duo, moins métallique, plus électro, toujours décapant.

  4. Algiers, There is no Year ; troisième album du meilleur (et seul ?) groupe de post-punk/soul. Toujours aussi entraînant et engagé, avec la voix imparable de Franklin James Fisher.

Covid-19

  1. Gold, Recession (qui combine les Bedroom Sessions, Isolation Sessions et Archive Sessions) ; comme beaucoup, iels ont mis à profit (!) le confinement pour retravailler et ressortir des morceaux, en configuration souvent plus intimistes.

  2. Brutus, Live in Ghent ; un live à la maison qui capte plutôt bien l'énergie du trio (et en particulier de la batteuse-chanteuse Stefanie Mannaerts).

Il n'est jamais trop tard...

  1. La Dispute, Somewhere at the Bottom of the River Between Vega and Altair ; premier disque du groupe, sorti en 2008, remasterisé 10 ans plus tard, monument de hardcore/screamo sensible qui se termine (si on fait exception de Nobody, Not Even the Rain) sur le fantastique The Last Lost Continent et ses montagnes russes émotionnelles.

  2. High Tension, Purge ; sorti en 2018 mais arrivé deux ans plus tard à mes oreilles (le temps d'arriver de ses antipodes natales), condensé de rage et de brutalité (avec en toile de fond l'histoire sanglante de l'Indonésie — dont est issue la chanteuse — dans les années 1960), rien que le titre d'ouverture (Red White Shame) vaut le coup d'oreille.